lundi 23 juillet 2012

Contre Fillon, Raffarin choisit Copé

Jean-François Copé, François Fillon et Jean-Pierre Raffarin,le 4 septembre 2011 lors du Campus UMP à Marseille
Jean-François Copé, François Fillon et Jean-Pierre Raffarin,le 4 septembre 2011 lors du Campus UMP à Marseille (Photo Gerard Julien. AFP)

Récit Le sénateur de la Vienne mise sur le secrétaire général de l’UMP pour prendre la tête du parti.

Par ALAIN AUFFRAY
Au menu de Jean-Pierre Raffarin : la vengeance. Un plat que l’ancien Premier ministre mange à toute heure, froid ou tiède, peu lui importe, dès lors qu’il s’agit de dézinguer François Fillon. Dans le Monde daté dimanche et lundi, il s’en donne à cœur joie. «Je n’ai rien contre François Fillon», attaque-t-il dans un bel euphémisme. La suite est plus franche : le candidat à la présidence de l’UMP est «secret et solitaire», il n’a donc absolument pas «le profil d’un chef de parti».
Tout le contraire de Jean-François Copé qui a, lui, parfaitement le profil. Oubliant ses critiques sur le cours trop droitier et pas assez humaniste de l’UMP, Raffarin estime que le député-maire de Meaux (Seine-et-Marne) se situe au «centre de gravité» du parti. Il lui «sait gré» d’avoir proposé la création de courants - baptisés «mouvements» - dotés de moyens financiers.
Le sénateur confirme dans son interview qu’il entend défendre aujourd’hui en vue du congrès de novembre une motion de la «droite modérée». Protecteur des centristes, Copé aurait une autre qualité, plus précieuse encore : «Il marche aussi à l’affectif», s’attendrit Raffarin, en référence au titre de son dernier ouvrage : Je marcherai toujours à l’affectif (Flammarion).
A l’inverse du solitaire Fillon, Copé a «le sens de l’équipe», c’est un «excellent organisateur» qui sait «faire preuve de fidélité». Pour le Girondin du Poitou-Charentes, cette accumulation de qualités se résume en une formule savoureuse : «Il y a du Chirac en lui.»

Impuissance. Le nom de l’ancien président ne vient par hasard. Il renvoie aux sources de la haine entre les deux ex-Premiers ministres. Comme Sarkozy, Fillon considère que les années Chirac sont dominées par l’hypocrisie, la lâcheté et l’impuissance politique. De Chirac, «on ne retiendra que mes réformes», avait osé Fillon après sa sortie du gouvernement Raffarin en 2004, alors qu’il était devenu le théoricien de la rupture sarkozyste.
Le sénateur de la Vienne n’a jamais pardonné cet affront. Pendant l’été 2010, il avait été en première ligne dans le combat pour la nomination de Jean-Louis Borloo à Matignon. Pas plus que celui de chef de parti, Fillon n’a «le profil» d’un chef de gouvernement : «Nous n’avons pas fait le même métier», confiait Raffarin à Libération, ramenant son successeur à son rang de simple «collaborateur» de l’hyperprésident Sarkozy.
Pièce maîtresse de l’offensive du secrétaire général de l’UMP, le ralliement de Raffarin n’est pas une surprise. Pour tous les cadres de l’UMP, c’était même une évidence. Mais ce soutien de poids ne va pas sans quelques inconvénients : les ultrasarkozystes s’agacent des états d’âme du Pictocharentais sur la dérive droitière de la campagne présidentielle.
Il les exprime d’ailleurs de nouveau dans son interview du week-end. Certes, le bilan est «globalement positif». Mais Raffarin ne veut pas s’interdire de faire le bilan critique de la présidence Sarkozy qui a stressé le pays en lui opposant un brillant exercice «solitaire» du pouvoir. Voilà qui pourrait embarrasser Copé qui se pose en meilleur défenseur de Sarkozy et dénonce comme il se doit les traîtres qui se permettent de parler d’inventaire, comme l’a fait Roselyne Bachelot, l’amie intime de François Fillon.
Gardien du temple sarkozyste, Brice Hortefeux ne goûte guère les dernières raffarinades. Pas plus qu’il n’apprécie Rachida Dati dans le rôle de porte-parole officieuse du candidat Copé. En dépit de sa vieille amitié pour ce dernier, Hortefeux pourrait être tenté de ne pas choisir.
Rival. Les militants effarés par la guerre Copé-Fillon pourront peut-être se tourner vers un autre champ de bataille, moins violent mais très prometteur. Nathalie Kosciusko-Morizet, 39 ans, a en effet annoncé ce week-end qu’elle se lançait, elle aussi, dans la compétition. «Je lance dès la semaine prochaine ma campagne en partant à la recherche des 8 000 parrainages» d’adhérents, a déclaré samedi la députée de l’Essonne. Si elle se pose en «alternative» ou «troisième voie», elle prend soin de souligner que sa candidature n’est «pas du tout dirigée contre l’un ou l’autre» des deux hommes forts de l’UMP. Elle assure y voir au contraire «une démarche apaisante», à l’instar de celle, avortée, d’Alain Juppé, pour éviter «un combat des chefs avant l’heure».
L’ancienne ministre de l’Ecologie a peut-être une autre raison, moins avouable, de lancer sa candidature : barrer la route à son ex-collègue de l’Agriculture, Bruno Le Maire, qui pourrait être son principal et ambitieux rival dans la course au leadership parmi les jeunes quadras de l’UMP. Le 18 novembre, les militants de l’UMP, pour désigner le futur chef de la droite, pourraient avoir un choix plus large que l’affrontement Copé-Fillon qui semblait devoir se dessiner.
http://www.liberation.fr/politiques/2012/07/22/contre-fillon-raffarin-choisit-cope_834880

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